CULTURE DE LA TOMATE INDUSTRIELLE : Les agriculteurs reviennent à la charge et menacent

Au mois de février dernier, pas moins de 2 500 agriculteurs ont abandonné la culture de la tomate industrielle, faute d’unités de transformation installées en plus de celles qui sont à l’arrêt et dont le potentiel de production est estimé à 60 000 tonnes de concentré de tomate.
Les opérateurs économiques de l’Est du pays, notamment les agriculteurs qui activent dans la production de la tomate industrielle, ne savent plus à quel saint se vouer pour sauver la prochaine saison 2020-2021. Pour cause, la crise sanitaire les a laminés à tel point qu’ ils se retrouvent dans une totale paupérisation, c’est-à-dire jusqu’à ne pas pouvoir faire face aux besoins rudimentaires de leurs familles. Spécialisés dans la filière tomate industrielle, ils ont décidé de monter au créneau, pour interpeller le ministère de l’Agriculture et du Développement rural et les responsables de l’Office national interprofessionnel des légumes et des viandes (Onilev) pour leur verser la subvention qui leur revient au titre de la campagne 2018-2019. Selon ces agriculteurs, il s’agit d’une subvention promise par les pouvoirs publics et qui est de l’ordre de 4 dinars par kilo de tomate. Cette subvention qui aurait dû leur être versée par cet office au terme de la saison 2018-2019 n’est toujours perçue en l’absence d’un décret officiel dudit ministère. Ces agriculteurs qui se disent « conscients » de la conjoncture que traversent leurs partenaires industriels, lesquels opérateurs peinent à écouler leurs stocks de concentré de tomate, ont lancé un appel de détresse à la tutelle pour qu’elle mette en œuvre la mesure de paiement qu’elle a elle-même préconisé. Résultat, si ces producteurs de la tomate industrielle ne perçoivent pas cette subvention, ils seront contraints, pour la majorité, de changer s’activité et, du coup, de quitter cette filière, car, disent-ils, ils ne pourront pas faire face aux dépenses de la prochaine campagne qui doit débuter en janvier 2021. En février dernier, lors d’une rencontre organisée avec les responsables de l’Onilev, les agriculteurs avaient soulevé plusieurs préoccupations portant essentiellement sur les retards dans le paiement des subventions accordées par l’Etat à cette filière à travers les unités de conserveries et la nouvelle condition de commercialisation exigée par le ministère du Commerce aux exploitants. Sensibilisé, le ministère de l’Agriculture s’est dit prêt à accompagner et à soutenir les opérations d’exportation de la tomate industrielle, à travers notamment des mesures incitatives et des primes. Suite à quoi, le ministère de tutelle avait réitéré la volonté des pouvoirs publics à encourager cette filière qualifiée de « stratégique » dans le cadre de la politique de diversification des exportations du pays. Devant une récolte abondante enregistrée ces dernières années, le ministère de tutelle avait alors appelé les professionnels de la filière à mieux s’organiser dans le cadre de coopératives agricoles et à saisir les opportunités offertes à travers l’exportation pour assurer une débouchée sur le marché international au surplus de la production nationale. La tutelle avait même engagé la réflexion pour organiser cette filière pour lancer un programme d’accompagnement comprenant des incitations et des primes à l’exportation. Mais la réalité est encore là ! Le même mois, la Confédération algérienne du patronat (CAP) avait tiré la sonnette d’alarme affirmant que 2500 agriculteurs ont abandonné la culture de la tomate industrielle faute d’unités de transformation. Selon la CAP, « 2 500 agriculteurs qui ont abandonné la culture de la tomate industrielle, faute d’unités de transformation installées en plus de celles qui sont à l’arrêt et dont le potentiel de production est estimé à 60 000 tonnes de concentré de tomate ». Une quantité qui pourrait satisfaire 70% des besoins nationaux en tomate industrielle, d’après l’organisation patronale. La confédération dresse un constat « inquiétant » de cette filière en citant « 12 000 familles qui se retrouvent dans la précarité à cause des problèmes auxquels font face les entreprises de l’industrie agroalimentaires ». « La relance de la filière est une priorité qui passe par un engagement sincère pour organiser et augmenter ses capacités productives », avait estimé la CAP. Une récolte prévisionnelle estimée à plus de 16 millions de quintaux de tomate industrielle était attendue en fin de la campagne agricole (2019/2020) à travers le territoire national. Transformé en double concentré et commercialisé à bas prix, « ce produit chinois, de moindre qualité, porte un fort préjudice à la production algérienne », a noté un transformateur. Il faut savoir que 90 % des unités de transformation de la tomate industrielle se situent à l’Est de l’Algérie, notamment dans les wilayas de Guelma, Skikda, El Tarf et Annaba », indiquait un transformateur. Une chose est sure, si les agriculteurs venaient à abandonner cette filière, les prix vont flamber sur le marché et seul le client en paiera le prix.
Nadine Oumakhlouf