Accès aux archives classifiées de plus de 50 ans: un geste “très positif” et “très important” (historiens)

ALGER, 10 mars 2021 (APS)- La décision du président français, Emmanuel
Macron, de faciliter l’accès, dès ce mercredi, aux archives classifiées de
plus de 50 ans, est un geste “très positif” et de “très important”, ont
estimé des historiens.
“Je peux dire, pour l’instant, que c’est une très bonne décision et c’est
une ouverture s’il y a un suivi permettant de la mettre en application
assez largement et qui permettrait particulièrement aux chercheurs
Algériens d’accéder à ces documents”, a déclaré à l’APS le directeur
général des Archives nationales, Abdelmadjid Chikhi, qualifiant la décision
de M. Macron de “très positive”.
Le Président Macron a décidé mardi de faciliter l’accès, dès ce mercredi,
aux archives classifiées de plus de 50 ans, y compris celles relatives à la
Guerre de libération nationale (1954-1962).
Cette décision a été prise afin de “permettre aux services d’archives de
procéder aux déclassifications des documents couverts par le secret de la
défense nationale jusqu’aux dossiers de l’année 1970 incluse”, avait
précisé un communiqué de la présidence de la République française, ajoutant
que “cette décision sera de nature à écourter sensiblement les délais
d’attente liés à la procédure de déclassification, s’agissant notamment des
documents relatifs à la Guerre de libération nationale”.
M. Chikhi a rappelé que cette ouverture intervient en réponse surtout à
“une action de la famille universitaire française qui avait envoyé des
pétitions au président français lui demandant d’ouvrir les archives et
surtout la levée des restrictions qui avaient été faites concernant ce
qu’ils appellent secret défense”.
Qualifiant, à ce propos, la décision d'”importante”, le DG des Archives
nationales a relevé l’importance d'”attendre les dispositions qui seront
prises sur le plan législatif comme le souligne le communiqué de la
présidence de la République française et sur le plan réglementaire
vis-à-vis de ce qui est appelé secret de défense nationale et également le
respect de la sécurité nationale et d’un certain nombre de contingences que
tous les Etats sont tenus de respecter”.
“Ce que nous pouvons dire pour l’instant c’est que l’accès sera un peu
plus ouvert, surtout que la période concernée est une période très
importante pour l’histoire de l’Algérie. Elle se situe entre les années
1920 et 1970”, a-t-il fait remarquer, notant que cette période a connu “la
gestation du mouvement national”.
Il a rappelé, dans ce contexte, quelques étapes qu’a connues cette période
dont certains développements de la colonisation notamment avant le
centenaire de 1930 où “la colonisation s’est exprimée d’une façon assez
abjecte et fêtait une centaine d’années de misère et d’application de loi
très dures vis-à-vis des Algériens”.
M. Chikhi a également évoqué la période 1942-1943 (Manifeste du peule
algérien) ainsi que celle de 1945 (manifestations réprimées dans le sang),
indiquant que cette dernière a permis aux Algériens d'”essayer d’accorder
leurs violons en vue de la lutte de libération nationale”.
“Donc, il y a un certain nombre de faits très importants et nous sommes
dans la période la plus dense de l’histoire de l’Algérie en matière
politique et en matière de rapport entre l’Algérie et la France”, a-t-il
dit, insistant sur le fait que ce déclassement est “une première étape”.
“Il y a beaucoup à faire. Les archivistes français vont se pencher sur pas
mal de dossiers. J’espère que ce sera positif pour l’écriture de
l’histoire”, a conclu le DG des archives nationales.
== Un geste positif qui s’inscrit dans le dégel des relations entre
l’Algérie et la France ==

De son côté, l’historien Mohammed Ould Si Kaddour El-Korso a estimé que la
décision du Président français est “positive”, affirmant ne pouvoir que la
“féliciter”.
“Sur le plan du principe, cette décision est un geste positif qui
s’inscrit dans le dégel des relations entre l’Algérie et la France, et je
ne peux que la féliciter”, a déclaré à l’APS M. El-Korso, s’interrogeant,
toutefois, sur “sa concrétisation dans sa globalité sur le plan pratique”.
L’historien a exprimé, dans ce sens, des “appréhensions” quant à
d'”éventuels” blocages quant à son application, soulignant que la décision
est, pour l’heure, “politique et non administrative”. Il a aussi émis des
réserves quant au début de son application. “Je crains que cela prendrait
du temps”, a confié l’historien.
“Différents subterfuges pourraient être trouvés par des administratifs
(archivistes) afin d’empêcher un accès total à ces archives, comme la
non-classification de certaines archives par manque de personnel ou une
sélection préméditée de ces documents”, a-t-il mis en garde, soulignant
l’importance “extrême” des documents liés à la torture, aux exécutions
sommaires ou encore celles se rapportant à la bataille d’Alger.
M. El-Korso a estimé par ailleurs qu’il revenait aux historiens et
autres étudiants de “bien savoir lire” les archives.
J.K

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